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Le pays du Brexit, malade du coronavirus et des inégalités



Outre-Manche, 63 000 décès supplémentaires ont été comptabilisés par l’Office for National Statistics (ONS) au cours des dix dernières semaines. Les Britanniques jugent sévèrement Boris Johnson.

Londres (Royaume-Uni), de notre correspondante.– De la part de Boris Johnson, on pensait avoir tout vu et tout entendu. Pourtant, le premier ministre britannique conservateur a réussi à provoquer la stupéfaction, une fois de plus, mercredi 3 juin à la Chambre des communes.

Alors que l’Office for National Statistics, l’équivalent de l’Insee, avait publié la veille une étude affirmant que le coronavirus avait fait près de 50 000 morts au Royaume-Uni, soit le bilan le plus mortel de toute l’Europe à ce stade de l’épidémie, le dirigeant conservateur s’est dit « très fier » du bilan de l’action de son gouvernement face au Covid-19.

Au chef de file des travaillistes, Keir Starmer, qui s’étonnait d’avoir lu dans le Daily Telegraph le jour même que Boris Johnson avait l’intention de prendre le « contrôle direct » de la gestion de la crise sanitaire – « Qui avait le contrôle direct [de la crise sanitaire – ndlr] jusqu’à présent ? », l’a questionné Keir Starmer –, le premier ministre a répondu que le bilan de l’action de son gouvernement était « considérable ».

Une Affiche Antigouvernementale Dans Le Nord-Ouest De Londres Le 3 Juin 2020. © Tolga Akmen/AfpUne affiche antigouvernementale dans le nord-ouest de Londres le 3 juin 2020. © Tolga Akmen/AFP

Les erreurs commises par Boris Johnson et ses ministres sont bien plus considérables encore. Longtemps indulgents envers les autorités, les Britanniques semblent désormais bien plus conscients des failles dans la gestion de la crise sanitaire : selon un sondage YouGov publié début juin, le Royaume-Uni est le pays au monde où la population se montre la plus critique envers les autorités – ex aequo avec le Mexique.

Pour rappel, jusqu’au 23 mars, date du début du confinement outre-Manche, le gouvernement britannique a misé sur des mesures a minima pour lutter contre la propagation du virus dans l’espoir de créer une « immunisation de groupe » – une approche susceptible de faire 500 000 morts à l’échelle du pays, avait reconnu mi-mars le médecin hygiéniste en chef d’Angleterre, Chris Whitty.

Deux mois et demi plus tard, le coût humain de la désinvolture dont ont fait preuve les autorités britanniques au cours des premières semaines de mars est flagrant.

Fin mai, une enquête de la BBC a montré que les grands événements sportifs qui s’étaient tenus mi-mars au Royaume-Uni – alors que le virus faisait déjà des ravages en Italie et en Espagne – avaient contribué à la propagation et probablement entraîné « la mort prématurée de certaines personnes », selon Tim Spector, professeur d’épidémiologie à King’s College.

D’après les données recueillies et analysées par le chercheur, les courses hippiques de Cheltenham, qui se sont étalées sur quatre jours et ont attiré environ 250 000 personnes au nord-ouest d’Oxford, et la rencontre de la Ligue des champions entre Liverpool et l’Atletico Madrid, qui s’est jouée avec des spectateurs en tribunes, ont été suivies de l’apparition de « foyers très chauds » du Covid-19 à Cheltenham et Liverpool.

Non seulement le gouvernement de Boris Johnson refuse de reconnaître ses erreurs, mais il tente de masquer la gravité des inégalités ethniques et sociales mises au jour par le coronavirus, sur fond de montée en puissance du mouvement antiraciste Black Lives Matter.

Un rapport gouvernemental publié la semaine dernière a confirmé ce que les médias avaient déjà révélé dès le mois d’avril : les Britanniques issus des minorités visibles sont beaucoup plus susceptibles de mourir du coronavirus que leurs concitoyens blancs.

Le risque est deux fois plus élevé pour les personnes originaires du Bangladesh. Pour les autres BAME (Black, Asian and Minority Ethnic, c’est-à-dire Noirs, Asiatiques et issus des minorités ethniques), qui selon le recensement de 2011 représentent 7,6 millions de personnes outre-Manche, le risque mortel que fait peser le Covid-19 est de 10 à 50 % plus élevé que pour les Blancs.

Cette situation renvoie à des inégalités économiques et sociales, a fait remarquer l’épidémiologiste Michael Marmot dans un article publié dans la revue du Royal College of Physicians. D’ailleurs, d’autres statistiques officielles ont montré que les résidents des quartiers les plus pauvres d’Angleterre et du Pays de Galles mouraient deux fois plus du Covid-19 que le reste de la population.

Michael Marmot, qui a publié un rapport alarmant sur la dégradation de l’espérance de vie des plus pauvres au Royaume-Uni au début de l’année, note que « la pandémie a mis en relief et aggravé les inégalités dans notre société qui conduisent à des inégalités en matière de santé » et préconise de « s’attaquer dès maintenant au racisme structurel et aux inégalités profondes responsables des inégalités sanitaires ».

Pour l’instant, le ministre de la santé, Matt Hancock, s’est contenté de dire que les « vies noires avaient de l’importance » (« Black lives matter »), sans donner aucune indication concernant d’éventuelles mesures gouvernementales à venir susceptibles de protéger davantage les Britanniques les plus vulnérables face au coronavirus, comme le réclament les députés travaillistes noirs, asiatiques et issus des minorités visibles.

Ni les déclarations en l’air du ministre de la santé ni l’optimisme à tout crin de Boris Johnson – sur lequel repose toute la stratégie du premier ministre concernant l’avenir du pays post-Brexit – ne sauraient masquer le fossé qui sépare les riches des pauvres et les Blancs des Noirs au Royaume-Uni.

Sur le papier, le premier ministre est en théorie intouchable puisqu’il dispose d’une large majorité à la Chambre des communes à la suite des élections législatives de décembre dernier. Cependant, au cours des dernières semaines, le soutien dont dispose Boris Johnson dans l’opinion s’est fragilisé, y compris au sein de son propre parti et dans les médias censés lui être tout acquis.

Les Britanniques se sont indignés du traitement de faveur accordé par le premier ministre à son conseiller le plus proche, Dominic Cummings, alors que celui-ci avait enfreint les règles du confinement en avril dernier.

Fin mai, Boris Johnson a pris la défense de son conseiller, affirmant que Dominic Cummings avait « suivi les instincts de n’importe quel père et parent » en se rendant dans la propriété de ses parents à 400 kilomètres de Londres alors que son épouse était malade, qu’il craignait de développer lui aussi les symptômes du coronavirus et de ne pas être en mesure de s’occuper de son fils de 4 ans.

Lundi 8 juin, réagissant au déboulonnement de la statue d’un marchand d’esclaves à Bristol le samedi précédent, le premier ministre n’a pas fait preuve de la même indulgence à l’égard des manifestants antiracistes. Le porte-parole du 10 Downing Street a fait savoir qu’il s’agissait d’un « acte criminel ». Il a ajouté : « Le premier ministre pense que, dans ce pays, il existe un processus démocratique. »

De la part de celui qui, l’an dernier, a suspendu le Parlement de manière anticonstitutionnelle pour empêcher les députés de faire barrage au Brexit, cette défense de la démocratie sonne creux.

Lundi soir, la veille d’une nouvelle manifestation à Oxford pour le déboulonnement de la statue d’un colonialiste du XIXe siècle, le premier ministre s’est senti dans l’obligation d’exprimer de l’empathie vis-à-vis des manifestants antiracistes. « Nous ne pouvons pas ignorer l’intensité des émotions provoquées par les images d’un homme noir mort aux mains de la police », a-t-il déclaré.

Boris Johnson, qui a tenu de multiples propos racistes et xénophobes dans le passé, a incité les manifestants à combattre le racisme et les discriminations « de manière pacifique et légale ». « Continuons à travailler ensemble avec toutes les communautés de ce pays pour remettre le Royaume-Uni en marche », a conclu le chef du gouvernement, dans une formule bizarre suggérant que l’antiracisme pourrait être dissous dans un élan de reconstruction de l’économie nationale.

Les mots du premier ministre risquent de trouver très peu d’écho auprès des militants antiracistes et de l’opinion publique de manière générale, alors que l’Office for National Statistics (ONS) vient de revoir une fois de plus le bilan mortel du coronavirus à la hausse : l’épidémie aurait fait 63 000 morts.

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