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A quand un débat démocratique sur les objectifs de la vaccination généralisée ?

Résumé : Comme leurs homologues anglais, les modélisateurs de l’Institut Pasteur continuent à prédire des catastrophes et à se tromper. Leur objectif est désormais de justifier la vaccination de la totalité de la population, au lieu de réserver les vaccins aux personnes à risque et de prendre au sérieux la question du consentement. Il y a urgence à ouvrir un vrai débat démocratique sur cette question.

Par Laurent Mucchielli

À force de croire à la puissance infiniment croissante des algorithmes, peut-on encore poser la question des limites d’une démocratie fondée sur la modélisation ? Telle est la très intéressante question posée dans le Lancet par deux responsables du haut commandement naval américain revenant sur les prédictions catastrophistes de l’équipe de l’Imperial College de Londres (ICL). Dans le même temps, les modélisateurs français, affiliés à l’ICL mais confinés à l’Institut Pasteur, publient un article court, testant différentes versions de couverture vaccinale en contexte incertain, tentant d’éclairer de futures décisions publiques. Limitant leurs projections aux trois grâces usuelles (sévérité, infectivité & susceptibilité) et se bornant donc à analyser uniquement les risques de formes graves, de transmission et d’infection, ils semblent encore une fois oublier que les conséquences de ces décisions seront bien plus vastes que leurs seules dimensions sanitaires.

Or, dans ces simulations, tout se joue à nouveau sur la « crainte d’une augmentation du R0 ». Serait-il de trois, de quatre – ou de combien de doigts mouillés ? Car les réductions des taux de transmission sont des paramètres qui ne résultent pas « naturellement » des algorithmes mais les nourrissent au contraire le plus souvent. Ces contraintes, imposées au départ des modèles, justifient ensuite secondairement la prévention des scénarios catastrophes, qu’on voulait croire inévitables, par des mesures dont l’efficacité n’est pourtant « pas claire » (de l’aveu même de ceux qui tentent désormais de l’évaluer).

C’est ainsi que ces modélisateurs avaient tenté de justifier le deuxième confinement avec l’arrivée à l’automne 2020 de 9000 patients en réanimation « quoi qu’on fasse », alors que le pic de contaminations fut enregistré le jour même de l’annonce de ce deuxième enfermement (soit le 28 octobre 2020). Or le même scénario s’est rejoué le 31 mars 2021 1 après que, tout au long de l’hiver, ils aient affiché la quasi-certitude d’envolées exponentielles des cas et donc, en conséquence, des décès. Or ces hypothèses ne se sont tout simplement pas matérialisées.

Quant à la mortalité (indicateur le plus important pour évaluer l’impact réel d’une épidémie), elle a diminué de novembre à avril en l’absence de tout confinement, justifiant a posteriori la décision du 29 janvier 2021. Ne s’y sont substituées que les preuves embarrassantes d’une incapacité d’organiser l’activité de certains services hospitaliers parisiens (handicap sur lequel il va bien falloir un jour se concentrer). Fallait-il de nouveau subordonner la réclusion de la Bretagne – et d’un très grand nombre de départements non concernés – à ce seul prétexte francilien ?

Dans ce contexte, en l’absence de surmortalité observée sur l’ensemble du territoire en février et mars 2021 par rapport à 2019, et avec des vaccins qui confirment leur efficacité, il convient dès lors de se poser trois questions :

  1. Quels seraient les buts et les conséquences d’une campagne de vaccination de grande ampleur à l’inverse d’une campagne ciblant les sujets à risque et les personnes consentantes ?
  2. Sur quels critères scientifiquement démontrés l’obligation vaccinale, et son corolaire le passeport sanitaire, seraient-ils fondés, notamment pour les enfants chez lesquels on ne dispose pas encore de données vaccinales certaines mais dont on mesure un risque de décès par Covid-19 mille fois inférieur à celui des nonagénaires ?
  3. Afin d’éviter que ces questions ne se traitent plus que de tribune publique en article de presse, au risque d’opposer en vain générations, victimes et vulnérabilités, notre république pourrait-elle organiser un débat véritablement démocratique sur la définition de ces buts et l’anticipation de leurs effets ?

Faute de quoi, pour « relâcher les mesures de contrôle et reprendre une vie normale » hors des contraintes exorbitantes proposées par nos modélisateurs « officiels », peut-on un instant considérer que d’autres solutions, assez différentes de celles envisagées soient à l’avenir malheureusement choisies par la population française ? En novembre, Emmanuel Hirsch, professeur d’éthique, évoquait déjà un haut risque séditieux en cas de prolongation de règles arbitraires. S’il advenait, de tout autres urgences s’accumuleraient alors.

Note

(1) « Le pic de la circulation virale semble avoir été atteint le 31 mars », soit le jour de l’annonce des mesures nationales « de freinage ». Une nouvelle fois, la cavalerie a donc été déployée après la bataille.

Jean-François TOUSSAINT, professeur de physiologie à l’Université de Paris

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